Garder l’espoir

Sans titre 1J’ai un passé pas hyper folichon, j’ai vécu des trucs pas drôles, les gens qui ont fait partie de ma vie n’ont pas tous été bienveillants à mon égard, c’est peu de le dire… Néanmoins, je suis heureuse.
J’aime la vie, je suis une bonne vivante (trop), j’aime rire et faire des blagues (pas toutes très bonnes mais j’ai le mérite d’essayer), et si mon passé m’inflige encore quelques larmes, mon présent m’apporte tant de bonheur et de rires que le malheur s’y trouve très rapidement noyé.

Petite, quand je vivais des trucs particulièrement atroces, je me demandais sérieusement s’il ne valait pas mieux mourir. Je me posais la question « Et si je me tuais? » et je finissais toujours (et heureusement) en concluant que non, même si ma vie comportait des moments trop difficiles à vivre, j’avais aussi la chance de vivre de beaux moments, et sans doute l’avenir m’en réservait de bien meilleur. Je pensais aussi aux gens qui m’aimaient, à ma maman, j’étais persuadée qu’elle ne pourrait pas vivre sans moi alors je restais aussi dans l’espoir de la protéger.
Dès toute petite, j’avais cette faculté de voir le beau dans la noirceur, l’espoir dans l’horreur… Je regardais ma vie et je m’accrochais comme une damnée à ces moments furtifs de joie, comme autant de petites pousses vertes dans un champ dévasté.
Ces moments de joie, je les cultivais, en partant dans des mondes imaginaires riches et foisonnants. Je m’inventais des vies où un avenir radieux m’attendait. Et je me persuadais que, dans la vraie vie, mon futur serait beau, que j’étais vouée à accomplir de grandes choses. Je me rêvais en écrivain goncourisé, en pacifiste nobélisée, en grand avocat pénaliste, en 2° gagnante de la course du Rhum… J’étais un poil mégalo, mais j’étais certaine d’avoir en moi les clés pour un avenir de bonheur, de joie et d’altruisme.

Cet espoir trouvait source dans les moments heureux que j’avais la chance de vivre avec ardeur. Si le malheur me terrassait, le bonheur, même fugace, la beauté de ce monde m’emportait dans une vague de joie intense et fracassante.
J’ai toujours considéré être une chanceuse. Ce qui peut paraître ironique au vu des événements douloureux de ma vie… Pourtant je reste convaincue d’avoir eu de la chance. Si ma route a eu le malheur de rencontrer des gens peu fréquentables, j’ai aussi sur mon chemin des personnes foncièrement généreuses qui m’ont appris à voir la vie comme elle est, belle et pleine de promesses. Je pense à mon oncle, figure principale de tout l’espoir qui m’habite, ma tante, leur couple, leur famille. Et aussi à ma mère, qui malgré sa maladresse, ses choix fondamentalement mauvais, a tout de même réussi à m’insuffler une certaine force de vie, grâce à son amour, sans doute.

Cet espoir, ce tempérament positif et combattif, m’a permis de passer toute mon enfance dans une étrange sérénité. Evidemment, je vivais l’horreur, j’étais malheureuse comme aucun enfant ne devrait l’être, mais en moi vivaient des pousses de bonheur, et je savais qu’elles grandiraient. Je savais qu’un jour je serais maîtresse de ma vie et j’aurais alors la possibilité de remplacer toutes les zones abîmées de mon existence par de beaux jardins fleuris.

J’ai perdu cet espoir à l’adolescence. En fin d’adolescence pour être précise, quand j’ai fait le pire choix de ma vie en me mettant en ménage avec un garçon pas fait pour moi. J’avais alors le sentiment que ma vie ne valait rien, que tous mes espoirs d’enfant n’était que des chimères. Je me suis détestée, j’ai renié la petite fille optimiste que j’avais été, et j’ai plongé dans le désespoir… Aidée par un garçon cynique qui n’aimait pas la vie, qui méprisait les gens qui pensaient qu’elle était belle.
J’ai accepté un boulot qui ne me convenait pas, j’habitais un endroit qui ne me plaisait pas, je faisais des trajets trop longs, et je pensais que cette vie glauque et froide, c’était LA vie, loin de tous mes rêves de petite fille. Je suis tombée enceinte et j’ai passé une grossesse entre tentatives de rébellion et renoncement total. J’étais devenue l’ombre de moi-même.
Ma vie était tracée, moche, triste et je me devais de la vivre pour ma fille…

Je n’ai compris qu’à sa naissance l’absurdité de ce mode de pensée. En voyant ce petit bébé, cette page blanche à préserver, à qui offrir toute la beauté du monde. Tout l’espoir de mes jeunes années, si proches, m’est revenu en pleine figure. Cette petite fille que je tenais dans mes bras méritait tous mes efforts pour lui apporter joie et gaieté, pour lui offrir une vie remplie d’espoir et de petites pousses vertes.

L’optimisme est très vite revenu. Avoir de l’espoir, être profondément positif, ça n’est pas être niais et idiot, c’est au contraire être hyper lucide. Etre positif n’empêche pas d’être clairvoyant, c’est plutôt une façon de toujours chercher des solutions pour aller mieux, pour résoudre les problèmes, et surtout avoir l’espoir de les régler… C’est partir gagnant et non défaitiste.
La vie est belle, c’est un fait. La vie est belle pour tous ceux qui se donnent la peine d’ouvrir les yeux.
Notre monde est cynique et nous porte à penser que quiconque voit de la lumière est un idiot abruti. Je pense l’inverse.
Je me suis retrouvée seule avec ma fille, la chance m’a souri à nouveau, je vivais dans un HLM, mais mon appartement faisait 70m², une chance inouïe, que j’ai su provoquer en allant vivre dans une petite ville (toute petite) plutôt que de rester à Paris. J’ai eu la chance de pouvoir, évidemment. J’ai pu nous construire une vie toute jolie, forte de mes 400€ de bourse par mois. Je retiens de ces trois années à Angoulême un profond espoir et un chemin menant vers le succès. J’ai connu des réussites brillantes, comme je me l’étais prédit quand j’étais petite.
Ces trois années ont sans doute été les pires de ma vie, car ma fille m’était régulièrement arrachée par un homme que je savais non apte à s’occuper d’elle… J’ai vécu des angoisses qui me réveillent encore la nuit.
Mais ces années font aussi partie des plus belles! Ma fille grandissait dans un environnement sain et épanouissant, la plupart du temps. J’avais la possibilité de lui offrir ce dont je rêvais pour elle… J’avais ma vie bien en main.

Après c’est un peu parti en sucette quand j’ai décidé de porter plainte et tout ça… Je n’étais plus maîtresse de grand chose, entre dépressions et parcours judiciaire… Mais j’avais toujours l’espoir chevillé au corps, et si je fais le bilan, les 8 dernières années sont plutôt couronnées de succès, de joie et de bonheur!

Aujourd’hui, je me retrouve pleinement, je sais que ma vie est merveilleuse et je sais que je le mérite. Je me suis battue pour ça, et je ne m’excuse plus de toute cette chance et ce bonheur. C’est sans doute extrêmement prétentieux, mais je pense avoir provoqué ce qui m’arrive de beau. Tout comme je me sens responsable de ce qui m’arrive de mauvais.
Ma famille a une belle vie, toute jolie, toute douce, et je sais désormais que je ne suis pas étrangère à tout cela! Nous avons construit tout ça, et nous le méritons. Je me suis battue et je reviens de loin, mais quand bien même je serais née avec une jolie vie, que ça ne m’enlèverait aucunement le droit et le mérite de la vivre.
Je souhaite de tout mon coeur que mes filles n’aient jamais à traverser d’épreuves trop douloureuses et je serai fière de les voir être heureuses. Le bonheur est avant tout une question de choix…

Savoir voir le beau et relativiser le moche.

(J’ai conscience que la vie peut aussi être une belle salope, et je touche du bois pour ne jamais connaître de drame atroce qui me ferait perdre à jamais la joie de vivre qui m’habite. Je ne suis pas idiote, je sais que certains événements sont insurmontables, et je sais que je serais incapable de vivre après certaines tragédies.
Mais ces tragédies sont rares et je ne les ai pas vécu. Ma vie à moi comporte des zones de noirceur, je ne minimise pas mon passé, loin de là, je pense simplement être restée dans les limites du supportable et du surmontable.)

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